La Terre

La Terre (paragraphe n°2931)

Chapitre II

Lorsque Fouan fut en plaine, sur le plateau, il éprouva une sorte de soulagement, sauvé des autres, heureux d'être seul et d'en crever. Longtemps, il rôda au hasard. La nuit s'était faite, le vent glacé le flagellait. Parfois, à certains grands souffles, il devait tourner le dos, l'haleine coupée, sa tête nue hérissée de ses rares cheveux blancs. Six heures sonnèrent, tout le monde mangeait dans Rognes ; et il avait une faiblesse des membres, qui ralentissait sa marche. Entre deux bourrasques, une averse tomba, drue, cinglante. Il fut trempé, marcha encore, en reçut deux autres. Et, sans savoir comment, il se trouva sur la place de l'Eglise, devant l'antique maison patrimoniale des Fouan, celle que Françoise et Jean occupaient à cette heure. Non ! il ne pouvait s'y réfugier, on l'avait aussi chassé de là. La pluie redoublait, si rude, qu'une lâcheté l'envahit. Il s'était approché de la porte des Buteau, à côté, guettant la cuisine, d'où sortait une odeur de soupe aux choux. Tout son pauvre corps y revenait se soumettre, un besoin physique de manger, d'avoir chaud, l'y poussait. Mais, dans le bruit des mâchoires, des mots échangés l'arrêtèrent.

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