La Terre

La Terre (paragraphe n°2974)

Chapitre II

Du reste, Fouan était comme rayé du nombre des vivants, Buteau agissait en son lieu et place, touchait et signait, sous le prétexte que le bonhomme perdait la tête. La rente de cent cinquante francs, provenant de la vente de la maison, lui était payée directement par monsieur Baillehache. Il n'avait eu qu'un ennui avec Delhomme, qui s'était refusé à verser les deux cents francs de la pension, entre des mains autres que celles de son père ; et Delhomme exigeait donc la présence de celui-ci ; mais il n'avait pas le dos tourné, que Buteau raflait la monnaie. Cela faisait trois cent cinquante francs, auxquels, disait-il d'une voix geignarde, il devait en ajouter autant et davantage, sans arriver à nourrir le vieux. Jamais il ne reparlait des titres ; ça dormait là, on verrait plus tard. Quant aux intérêts, ils passaient toujours, selon lui, à tenir l'engagement avec le père Saucisse, quinze sous chaque matin, pour l'achat à viager d'un arpent de terre. Il criait qu'on ne pouvait pas lâcher ce contrat, qu'il y avait trop d'argent engagé. Pourtant, le bruit courait que le père Saucisse, terrorisé, menacé d'un mauvais coup, avait consenti à le rompre, en lui rendant la moitié des sommes touchées, mille francs sur deux mille ; et, si ce vieux filon se taisait, c'était par une vanité de gueux qui ne voulait point avoir été roulé à son tour. Le flair de Buteau l'avertissait que le père Fouan mourrait le premier : une supposition qu'on lui aurait donné une chiquenaude, à coup sûr, il ne se serait pas relevé.

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