Au Bonheur des dames

Au Bonheur des dames (paragraphe n°163)

Chapitre I

Moi, jusqu'ici, je n'ai pas trop à me plaindre. Oh ! il m'a fait du tort, le gredin ! Mais il ne tient encore queles draps de dame, des draps légers, pour robes, et les draps plus forts, pour manteaux. On vient toujours chez moi acheter les articles d'homme, les velours de chasse, les livrées ; sans parler des flanelles et des molletons, dont je le défis bien d'avoir un assortiment aussi complet... Seulement, il m'asticote, il croit me faire tourner le sang, parce qu'il a mis son rayon de draperie, là, en face. Tu as vu son étalage, n'est-ce pas ? Toujours, il y plante ses plus belles confections, au milieu d'un encadrement de pièces de drap, une vraie parade de saltimbanque pour raccrocher les filles... Foi d'honnête homme ! je rougirais d'employer de tels moyens. Depuis près de cent ans, le Vieil Elbeuf est connu, et il n'a pas besoin à sa porte de pareils attrape-nigauds. Tant que je vivrai, la boutique restera telle que je l'ai prise, avec ses quatre pièces d'échantillons, à droite et à gauche, pas davantage !

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