Germinal

Germinal (paragraphe n°2867)

Partie : Septième partie, chapitre III

Négrel dut se résigner à tirer la corde du signal, pour qu'on le remontât. Puis, il se fit arrêter de nouveau. Une stupeur lui restait, celle de cet accident, si brusque, dont il ne comprenait pas la cause. Il désirait se rendre compte, il examina les quelques pièces du cuvelage qui tenaient bon. A distance, des déchirures, des entailles dans le bois l'avaient surpris. Sa lampe agonisait, noyée d'humidité, et il toucha de ses doigts, il reconnut très nettement des coups de scie, des coups de vilebrequin, tout un travail abominable de destruction. Evidemment, on avait voulu cette catastrophe. Il demeurait béant, les pièces craquèrent, s'abîmèrent avec leurs cadres, dans un dernier glissement qui faillit l'emporter lui-même. Sabravoure s'en était allée, l'idée de l'homme qui avait fait ça dressait ses cheveux, le glaçait de la peur religieuse du mal, comme si, mêlé aux ténèbres, l'homme eût encore été là, énorme, pour son forfait démesuré. Il cria, il agita le signal d'une main furieuse ; et il était grand temps d'ailleurs, car il s'aperçut, cent mètres plus haut, que le cuvelage supérieur se mettait à son tour en mouvement : les joints s'ouvraient, perdaient leur brandissage d'étoupe, lâchaient des ruisseaux. Ce n'était à présent qu'une question d'heures, le puits achèverait de se décuveler, et s'écroulerait.

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