Germinal

Germinal (paragraphe n°3045)

Partie : Septième partie, chapitre V

Alors, ce fut une lutte nouvelle. Ils avaient allumé la dernière lampe, elle s'épuisait en éclairant la crue, dont la hausse régulière, entêtée, ne s'arrêtait pas. Ils eurent d'abord de l'eau aux chevilles, puis elle leur mouilla lesgenoux. La voie montait, ils se réfugièrent au fond, ce qui leur donna un répit de quelques heures. Mais le flot les rattrapa, ils baignèrent jusqu'à la ceinture. Debout, acculés, l'échine collée contre la roche, ils la regardaient croître, toujours, toujours. Quand elle atteindrait leur bouche, ce serait fini. La lampe, qu'ils avaient accrochée, jaunissait la houle rapide des petites ondes ; elle pâlit, ils ne distinguèrent plus qu'un demi-cercle diminuant sans cesse, comme mangé par l'ombre qui semblait grandir avec le flux ; et, brusquement, l'ombre les enveloppa, la lampe venait de s'éteindre, après avoir craché sa dernière goutte d'huile. C'était la nuit complète, absolue, cette nuit de la terre qu'ils dormiraient, sans jamais rouvrir leurs yeux à la clarté du soleil.

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