L'Assommoir

L'Assommoir (paragraphe n°1294)

Partie : Préface de l'auteur, chapitre VIII

Lantier eut le bec cloué par cette réponse. Il rangea ses livres et ses journaux sur une planche de l'armoire ; et comme il paraissait désolé de ne pas avoir une petite bibliothèque, pendue au-dessus de la table, Gervaise promit de lui en procurer une. Il possédait l'Histoire de dix ans, de Louis Blanc, moins le premier volume, qu'il n'avait jamais eu d'ailleurs, Les Girondins, de Lamartine,en livraisons à deux sous, Les Mystères de Paris et Le Juif errant, d'Eugène Sue, sans compter un tas de bouquins philosophiques et humanitaires, ramassés chez les marchands de vieux clous. Mais il couvait surtout ses journaux d'un regard attendri et respectueux. C'était une collection faite par lui, depuis des années. Chaque fois qu'au café il lisait dans un journal un article réussi et selon ses idées, il achetait le journal, il le gardait. Il en avait ainsi un paquet énorme de toutes les dates et de tous les titres, empilés sans ordre aucun. Quand il eut sortit ce paquet du fond de la malle, il donna dessus des tapes amicales, en disant aux deux autres :

?>