L'Assommoir

L'Assommoir (paragraphe n°1363)

Partie : Préface de l'auteur, chapitre VIII

Et Bibi-la-Grillade accepta une prune. Il devait être là, sur le banc, à attendre une tournée. Cependant, Lantier défendait les patrons ; ils avaient parfois joliment du mal, il en savait quelque chose, lui qui sortait des affaires. De la jolie fripouille, les ouvriers ! toujours en noce, se fichant de l'ouvrage, vous lâchant au beau milieu d'une commande, reparaissant quand leur monnaie est nettoyée. Ainsi, il avait eu un petit Picard, dont la toquade était de se trimbaler en voiture ; oui, dès qu'il touchait sa semaine, il prenait des fiacres pendant des journées. Est-ce que c'était là un goût de travailleur ? Puis, brusquement, Lantier se mit à attaquer aussi les patrons. Oh ! il voyait clair, il disait ses vérités à chacun. Une sale race après tout, des exploiteurs sans vergogne, des mangeurs de monde. Lui, Dieu merci ! pouvait dormir la conscience tranquille, car il s'était toujours conduit en ami avec ses hommes, et avait préféré ne pas gagner des millions comme les autres.

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