L'Assommoir

L'Assommoir (paragraphe n°315)

Partie : Préface de l'auteur, chapitre II

Vers les derniers jours de juin, Coupeau perdit sa gaieté. Il devenait tout chose. Gervaise, inquiète de certains regards, se barricadait la nuit. Puis, après une bouderie qui avait duré du dimanche au mardi, tout d'un coup, un mardi soir, il vint frapper chez elle, vers onze heures. Elle ne voulait pas lui ouvrir ; mais il avait la voix si douce et si tremblante, qu'elle finit par retirer la commode poussée contre la porte. Quand il fut entré, elle le crut malade, tant il lui parut pâle, les yeux rougis, le visage marbré. Et il restait debout, bégayant, hochant la tête. Non, non, il n'était pas malade. Il pleurait depuisdeux heures, en haut, dans sa chambre ; il pleurait comme un enfant, en mordant son oreiller, pour ne pas être entendu des voisins. Voilà trois nuits qu'il ne dormait plus. Ça ne pouvait pas continuer comme ça.

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