L'Assommoir

L'Assommoir (paragraphe n°357)

Partie : Préface de l'auteur, chapitre II

Coupeau força Gervaise à se lever. Elle pouvait bien s'approcher, elle verrait. Le chaîniste consentit d'un grognement. Il enroulait le fil préparé par sa femme autour d'un mandrin, une baguette d'acier très mince. Puis, il donna un léger coup de scie, qui tout le long dumandrin coupa le fil, dont chaque tour forma un maillon. Ensuite, il souda. Les maillons étaient posés sur un gros morceau de charbon de bois. Il les mouillait d'une goutte de borax, prise dans le cul d'un verre cassé, à côté de lui ; et, rapidement, il les rougissait à la lampe, sous la flamme horizontale du chalumeau. Alors, quand il eut une centaine de maillons, il se remit une fois encore à son travail menu, appuyé au bord de la cheville, un bout de planchette que le frottement de ses mains avait poli. Il ployait la maille à la pince, la serrait d'un côté, l'introduisait dans la maille supérieure déjà en place, la rouvrait à l'aide d'une pointe ; cela avec une régularité continue, les mailles succédant aux mailles, si vivement, que la chaîne s'allongeait peu à peu sous les yeux de Gervaise, sans lui permettre de suivre et de bien comprendre.

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