L'Œuvre

L'Œuvre (paragraphe n°467)

Chapitre III

Il était quatre heures, la belle journée s'achevait dans un poudroiement glorieux de soleil. A droite et à gauche, vers la Madeleine et vers le Corps législatif, des lignes d'édifices filaient en lointaines perspectives, se découpaient nettement au ras du ciel ; tandis que le jardin des Tuileries étageait les cimes rondes de ses grands marronniers. Et, entre les deux bordures vertes descontre-allées, l'avenue des Champs-Elysées montait tout là-haut, à perte de vue, terminée par la porte colossale de l'Arc de triomphe, béante sur l'infini. Un double courant de foule, un double fleuve y roulait, avec les remous vivants des attelages, les vagues fuyantes des voitures, que le reflet d'un panneau, l'étincelle d'une vitre de lanterne semblaient blanchir d'une écume. En bas, la place, aux trottoirs immenses, aux chaussées larges comme des lacs, s'emplissait de ce flot continuel, traversée en tous sens du rayonnement des roues, peuplée de points noirs qui étaient des hommes ; et les deux fontaines ruisselaient, exhalaient une fraîcheur, dans cette vie ardente.

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