La Bête humaine

La Bête humaine (paragraphe n°1316)

Chapitre VIII

Lentement, Séverine ôta son chapeau. Mais, comme elle allait aussi enlever son manteau, elle grelotta. On gelait dans cette chambre. Près du poêle, dans une petite caisse, il y avait du charbon et du menu bois. Tout de suite, sans se dévêtir davantage, l'idée lui vint d'allumer du feu ; et cela l'amusa, fut une distraction au malaise qu'elle avait éprouvé d'abord. Ce ménage qu'elle faisait d'une nuit d'amour, cette pensée qu'ils auraient bien chaud tous les deux, la rendit à la joie tendre de leur escapade : depuis si longtemps, sans espoir de jamais l'obtenir, ils rêvaient une nuit pareille ! Lorsque le poêle ronfla, elle s'ingénia à d'autres préparatifs, rangea les chaises à sa guise, chercha des draps blancs et refit complètement le lit, ce qui lui donna un vrai mal, car il était en effet très large. Son ennui fut de ne rien trouver à manger ni à boire, dans le buffet : sans doute, depuis trois jours qu'il était le maître, Pecqueux avait balayé jusqu'aux miettes, sur les planches. C'était comme pour la lumière, il n'y avait que ce bout de bougie ; mais, quand on se couche, on n'a pas besoin de voir clair. Et, ayanttrès chaud maintenant, animée, elle s'arrêta au milieu de la pièce, donnant un coup d'œil, pour s'assurer que rien ne manquait.

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