La Conquête de Plassans

La Conquête de Plassans (paragraphe n°1172)

Chapitre XIII

Alors, Mouret montait au premier étage. Là, il s'enfermait dans une chambre, qu'il appelait son bureau, une grande pièce nue, meublée d'une table et de deuxchaises. Cette pièce devint son refuge, aux heures où la cuisinière le traquait. Il s'y ennuyait, redescendait au jardin, qu'il cultivait avec une sollicitude plus grande. Marthe ne semblait pas avoir conscience des bouderies de son mari ; il restait parfois une semaine silencieux, sans qu'elle s'inquiétât ni se fâchât. Elle se détachait chaque jour davantage de ce qui l'entourait ; elle crut même, tant la maison lui parut paisible, lorsqu'elle n'entendit plus, à toute heure, la voix grondeuse de Mouret, que celui-ci s'était raisonné, qu'il s'était arrangé comme elle un coin de bonheur. Cela la tranquillisa, l'autorisa à s'enfoncer plus avant dans son rêve. Quand il la regardait, les yeux troubles, ne la reconnaissant plus, elle lui souriait, elle ne voyait pas les larmes qui lui gonflaient les paupières.

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