La Curée

La Curée (paragraphe n°1284)

Chapitre VI

Et elle revint dans le salon. Mais elle dut rester à l'entrée. Une figure du cotillon obstruait le passage.L'orchestre jouait en sourdine une phrase de valse. Les dames, se tenant par la main, formaient un rond, un de ces ronds de petites filles chantant Giroflé girofla ; et elles tournaient le plus vite possible, tirant sur leurs bras, riant, glissant. Au milieu, un cavalier - c'était le malicieux monsieur Simpson - avait à la main une longue écharpe rose ; il l'élevait, avec le geste d'un pêcheur qui va jeter un coup d'épervier ; mais il ne se pressait pas, il trouvait drôle, sans doute, de laisser tourner ces dames, de les fatiguer. Elles soufflaient, elles demandaient grâce. Alors il lança l'écharpe, et il la lança avec tant d'adresse, qu'elle alla s'enrouler autour des épaules de madame d'Espanet et de madame Haffner, tournant côte à côte. C'était une plaisanterie de l'Américain. Il voulut ensuite valser avec les deux dames à la fois, et il les avait déjà prises à la taille toutes deux, l'une de son bras gauche, l'autre de son bras droit, lorsque monsieur de Saffré dit, de sa voix sévère de roi du cotillon :

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