La Faute de l'Abbé Mouret

La Faute de l'Abbé Mouret (paragraphe n°1394)

Partie : Livre 3, chapitre 1

Elle le prit, le berça un instant, le posa sur une chaise, où il dormit, dans une paix de chérubin. L'église retombaau calme triste, que coupaient seuls les cris des moineaux, sur le sorbier. A l'autel, Vincent avait reporté le Missel à droite, l'abbé Mouret venait de replier le corporal et de le glisser dans la bourse. Maintenant, il disait les dernières oraisons, avec un recueillement sévère, que n'avaient pu troubler ni les pleurs de l'enfant ni les rires des grandes filles. Il paraissait ne rien entendre, être tout aux vœux qu'il adressait au ciel pour le bonheur du couple dont il avait béni l'union. Ce matin-là, le ciel restait gris d'une poussière de chaleur, qui noyait le soleil. Par les carreaux cassés, il n'entrait qu'une buée rousse, annonçant un jour d'orage. Le long des murs, les gravures violemment enluminées du chemin de la Croix étalaient la brutalité assombrie de leurs taches jaunes, bleues et rouges. Au fond de la nef, les boiseries séchées de la tribune craquaient ; tandis que les herbes du perron, devenues géantes, laissaient passer sous la grand-porte de longues pailles mûres, peuplées de petites sauterelles brunes. L'horloge, dans sa caisse de bois, eut un arrachement de mécanique poitrinaire, comme pour s'éclaircir la voix, et sonna sourdement le coup de six heures et demie.

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