La Faute de l'Abbé Mouret

La Faute de l'Abbé Mouret (paragraphe n°710)

Partie : Livre 2, chapitre III

Mais, le lendemain, il fut pris d'une peur d'enfant. Jamais il ne consentit à ce que les fenêtres fussent grandes ouvertes. Il murmurait : " Tout à l'heure, plus tard. " Il demeurait anxieux, il avait l'inquiétude du premier coup de lumière qu'il recevrait dans les yeux. Le soir arriva, qu'il n'avait pu prendre la décision de revoir le soleil en face. Il était resté le visage tourné vers les rideaux, suivant sur la transparence du linge le matinpâle, l'ardent midi, le crépuscule violâtre, toutes les couleurs, toutes les émotions du ciel. Là, se peignait jusqu'au frisson que le battement d'ailes d'un oiseau donne à l'air tiède, jusqu'à la joie des odeurs, palpitant dans un rayon. Derrière ce voile, derrière ce rêve attendri de la vie puissante du dehors, il écoutait monter le printemps. Et même il étouffait un peu, par moments, lorsque l'afflux du sang nouveau de la terre, malgré l'obstacle des rideaux, arrivait à lui trop rudement.

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