La Faute de l'Abbé Mouret

La Faute de l'Abbé Mouret (paragraphe n°713)

Partie : Livre 2, chapitre III

Elle tirait vivement les rideaux, elle ouvrait les fenêtres toutes larges. Lui, se leva, se mit à genoux sur son lit, suffoquant, défaillant, les mains serrées contre sa poitrine, pour empêcher son cœur de se briser. En face de lui, il avait le grand ciel, rien que du bleu, un infini bleu ; il s'y lavait de la souffrance, il s'y abandonnait, comme dans un bercement léger, il y buvait de la douceur, de la pureté, de la jeunesse. Seule, la branche dont il avait vu l'ombre dépassait la fenêtre, tachait la mer bleue d'une verdure vigoureuse ; et c'était déjà là un jet trop fort pour ses délicatesses de malade, qui se blessaient de la salissure des hirondelles volant à l'horizon. Il naissait. Il poussait de petits cris involontaires, noyé de clarté, battu par des vagues d'air chaud, sentant couler en lui tout un engouffrement de vie. Ses mains se tendirent, et il s'abattit, il retomba sur l'oreiller, dans une pâmoison.

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