La Fortune des Rougon

La Fortune des Rougon (paragraphe n°1016)

Partie : Préface, chapitre VI

Rougon, vers cinq heures du matin, osa enfin sortir de chez sa mère. La vieille s'était endormie sur une chaise. Il s'aventura doucement jusqu'au bout de l'impasse Saint-Mittre. Pas de bruit, pas une ombre. Il poussa jusqu'à la porte de Rome. Le trou de la porte, ouverte à deux battants, béante, s'enfonçait dans le noir de la ville endormie. Plassans dormait à poings fermés, sans paraître se douter de l'imprudence énorme qu'il commettait en dormant ainsi les portes ouvertes. On eût dit une cité morte. Rougon, prenant confiance, s'engagea dans la rue de Nice. Il surveillait de loin les coins des ruelles ; il frissonnait, à chaque creux de porte, croyant toujours voir une bande d'insurgés lui sauter aux épaules. Mais il arriva au cours Sauvaire sans mésaventure. Décidément, les insurgés s'étaient évanouis dans les ténèbres, comme un cauchemar.

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