La Fortune des Rougon

La Fortune des Rougon (paragraphe n°597)

Partie : Préface, chapitre IV

La masure de l'impasse Saint-Mittre se composait d'abord d'une grande salle sur laquelle s'ouvrait directement la porte de la rue ; cette salle, dont le sol était pavé, et qui servait à la fois de cuisine et de salle à manger avait pour uniques meubles des chaises de paille, une table posée sur des tréteaux, et un vieux coffre qu'Adélaïde avait transformé en canapé, en étalant sur le couvercle un lambeau d'étoffe de laine ; dans uneencoignure, à gauche d'une vaste cheminée, se trouvait une Sainte Vierge en plâtre, entourée de fleurs artificielles, la bonne mère traditionnelle des vieilles femmes provençales, si peu dévotes qu'elles soient. Un couloir menait de la salle à la petite cour, située derrière la maison, et dans laquelle se trouvait un puits. A gauche du couloir, était la chambre de tante Dide, une étroite pièce meublée d'un lit en fer et d'une chaise ; à droite, dans une pièce plus étroite encore, où il y avait juste la place d'un lit de sangle, couchait Silvère, qui avait dû imaginer tout un système de planches, montant jusqu'au plafond, pour garder auprès de lui ses chers volumes dépareillés, achetés sou à sou dans la boutique d'un fripier du voisinage. La nuit, quand il lisait, il accrochait sa lampe à un clou, au chevet de son lit. Si quelque crise prenait sa grand-mère, il n'avait, au premier râle, qu'un saut à faire pour être auprès d'elle.

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