La Fortune des Rougon

La Fortune des Rougon (paragraphe n°739)

Partie : Préface, chapitre IV

Les insurgés ne pouvaient songer à conserver Plassans en leur pouvoir. La ville était animée d'un esprit trop réactionnaire, pour qu'ils cherchassent même à y établir une commission démocratique, comme ils l'avaient déjà fait ailleurs. Ils se seraient éloignés simplement, si Macquart, poussé et enhardi par ses haines, n'avait offert de tenir Plassans en respect, à la condition qu'on laissât sous ses ordres une vingtaine d'hommes déterminés. On lui donna les vingt hommes, à la tête desquels il alla triomphalement occuper la mairie. Pendant ce temps, la colonne descendait le cours Sauvaire et sortait par la Grand-Porte, laissant derrièreelle, silencieuses et désertes, les rues qu'elle avait traversées comme un coup de tempête. Au loin s'étendaient les routes toutes blanches de lune. Miette avait refusé le bras de Silvère ; elle marchait bravement, ferme et droite, tenant le drapeau rouge à deux mains, sans se plaindre de l'onglée qui lui bleuissait les doigts.

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