La Joie de vivre

La Joie de vivre (paragraphe n°1281)

Chapitre VI

Alors, deux longues nuits et un jour sans fin s'écoulèrent, ces heures terribles où la mort habite le foyer. Cazenove n'avait reparu que pour constater le décès, surpris une fois de plus d'une fin si rapide. Lazare, qui ne se coucha pas la première nuit, écrivit jusqu'au jour des lettres à des parents éloignés. On devait transporter le corps au cimetière de Caen, dans le caveau de la famille. Le docteur s'était obligeamment chargé de toutes les formalités ; et il n'y en eut qu'une de pénible, à Bonneville, la déclaration que Chanteau était chargé de recevoir en qualité de maire. Pauline, n'ayant pas de robe noire convenable, se hâta de s'en arranger une, à l'aide d'une ancienne jupe et d'un châle de mérinos, dans lequel elle se tailla un corsage. La première nuit, puis la journée passèrent encore, au milieu de la fièvre de ces occupations ; mais ce fut la seconde nuit qui s'éternisa, rendue interminable par la douloureuse attente du lendemain. Personne ne put dormir, les portes restaient ouvertes, des bougies allumées traînaient sur les marches et sur les meubles ; tandis qu'une odeur de phénol avait envahi jusqu'aux pièces écartées. Tous en étaient à cette courbature de la douleur, la bouche empâtée, les yeux troubles ; et ils n'avaient plus que le sourd besoin de ressaisir la vie.

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