La Joie de vivre

La Joie de vivre (paragraphe n°1491)

Chapitre VII

Alors, pendant que Véronique refermait furieusement la porte, Mathieu, comme s'il avait compris, vint appuyer sa tête sur le genou de son maître. Tous voulurent lui faire fête, on cassa du sucre, on tâcha de l'exciter. Autrefois, le petit jeu de chaque soir était de poser un morceau de sucre, loin de lui, de l'autre côté de la table ; vite, il faisait le tour, mais on avait déjà retiré le morceau, pour le placer à l'autre bout ; et sans cesse il faisait le tour, et sans cesse le sucre sautait, jusqu'à ce que, étourdi, stupéfié de ce continuel escamotage, il se mît à jeter des abois féroces. Ce fut ce jeu que Lazare essaya de recommencer, dans la pensée fraternelle de donner encore une récréation à l'agonie de la triste bête. Le chien battit un instant de la queue, tourna une fois, puis buta contre la chaise de Pauline. Il ne voyait pas le sucre, son corps décharné s'en allait de côté, le sang pleuvait en gouttes rouges autour de la table. Chanteau ne fredonnait plus, une pitié serrait le cœur de tout le monde, au spectacle du pauvre Mathieu mourant, qui tâtonnait en se rappelant les parties du Mathieu glouton de jadis.

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