La Joie de vivre

La Joie de vivre (paragraphe n°283)

Chapitre II

Mais leur joie fut de se baigner. La plage était trop rocheuse pour attirer les familles de Caen et de Bayeux. Tandis que, chaque année, les falaises d'Arromanches se couvraient de chalets nouveaux, pas un baigneur ne se montrait à Bonneville. Eux avaient découvert, à un kilomètre du village, du côté de Port-en-Bessin, un coin adorable, une petite baie enfoncée entre deux rampes de roches, et toute d'un sable fin et doré. Ils la nommèrent la baie du Trésor, à cause de son flot solitaire qui semblait rouler des pièces de vingt francs. Là, ils étaient chez eux, ils se déshabillaient sans honte. Lui, continuant de causer, se tournait à demi, boutonnait son costume. Elle, un instant, tenait à sa bouche la coulisse de sa chemise, puis apparaissait serrée aux hanches, ainsi qu'un garçon, parune ceinture de laine. En huit jours, il lui apprit à nager : elle y mordait davantage qu'au piano, elle avait une bravoure qui lui faisait souvent boire de grands coups d'eau de mer. Toute leur jeunesse riait dans cette fraîcheur âpre, quand une lame plus forte les culbutait l'un contre l'autre. Ils sortaient luisants de sel, ils séchaient au vent leurs bras nus, sans cesser leurs jeux hardis de galopins. C'était encore plus amusant que la pêche.

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