La Joie de vivre

La Joie de vivre (paragraphe n°315)

Chapitre II

Alors, lentement, une année s'écoula. Madame Chanteau avait changé d'avis : au lieu d'envoyer Pauline en pension, elle la gardait près d'elle, déterminée surtout par les plaintes de Chanteau, qui ne pouvait plus se passer de l'enfant, mais elle ne s'avouait pas cette raisonintéressée, elle parlait de se charger de son instruction, toute rajeunie à l'idée de rentrer ainsi dans l'enseignement. En pension, les petites filles entendent de vilaines choses, elle voulait pouvoir répondre de la parfaite innocence de son élève. On repêcha, au fond de la bibliothèque de Lazare, une Grammaire, une Arithmétique, un Traité d'Histoire, même un résumé de la Mythologie ; et madame Chanteau reprit la férule, une seule leçon par jour, des dictées, des problèmes, des récitations. La grande chambre du cousin était transformée en salle d'étude, Pauline dut se remettre au piano, sans compter le maintien, dont sa tante lui démontra sévèrement les principes, pour corriger ses allures garçonnières ; du reste, elle était docile et intelligente, elle apprenait volontiers, même quand les matières la rebutaient. Un seul livre l'ennuyait, le catéchisme. Elle n'avait pas encore compris que sa tante se dérangeât le dimanche et la conduisît à la messe. Pour quoi faire ? à Paris, on ne la menait jamais à Saint-Eustache, qui pourtant se trouvait près de leur maison. Les idées abstraites n'entraient que très difficilement dans son cerveau, sa tante dut lui expliquer qu'une demoiselle bien élevée ne pouvait, à la campagne, se dispenser de donner le bon exemple, en se montrant polie avec le curé. Elle-même n'avait jamais eu qu'une religion de convenance, qui faisait partie d'une bonne éducation, au même titre que le maintien.

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