La Joie de vivre

La Joie de vivre (paragraphe n°353)

Chapitre II

Alors, Pauline rougit, à l'idée de mentir, pour cacher plus longtemps ses lectures. Le mensonge lui était insupportable, elle préféra se confesser. Quand madame Chanteau, ouvrant les livres sur la table, aperçut les gravures, elle resta pétrifiée. Elle qui se donnait tant de peine, afin d'innocenter les amours de Jupiter ! Vraiment, Lazare aurait dû mettre sous clef de pareilles abominations. Et, longuement, elle interrogea la coupable, avec des précautions et des sous-entendus de toutes sortes. Mais Pauline, de son air candide, achevait de l'embarrasser. Eh bien, quoi ? on était fait ainsi, il n'y avait pas de mal. Sa passion purement cérébrale éclatait, aucune sensualité sournoise ne s'éveillait encore dans ses grands yeux clairs d'enfant. Elle avait trouvé, sur la même planche, des romans dont elle s'était dégoûtée dès les premières pages, tellement ils l'ennuyaient, bourrés de phrases où elle ne comprenait rien. Sa tante, de plus en plus déconcertée, un peu tranquillisée cependant, se contenta de fermer l'armoire et de garder la clef. Huit jours après, la clef traînait de nouveau, et Pauline s'accordait de loin en loin, comme une récréation, de lire le chapitre des névroses, en songeant à son cousin, ou le traitement de la goutte, avec l'idée de soulager son oncle.

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