La Terre

La Terre (paragraphe n°1701)

Partie : TROISIEME PARTIE, chapitre IV

Palmyre, dans le champ voisin, où depuis trois jours la paille des javelles avait séché, était en train de lier des gerbes ; et, elle, il ne la surveillait pas, car, ce qui ne se fait guère, il l'avait mise au cent de gerbes, sous le prétexte qu'elle n'était plus forte, trop vieille déjà, usée, et qu'il serait en perte s'il lui donnait trente sous, comme aux femmes jeunes. Même elle avait dû le supplier, il ne s'était décidé à la prendre qu'en la volant, de l'air résignéd'un chrétien qui consent à une bonne œuvre. La misérable soulevait trois, quatre javelles, tant que ses bras maigres pouvaient en contenir ; puis, avec un lien tout prêt, elle nouait sa gerbe fortement. Ce liage, cette besogne si dure que les hommes d'habitude se réservent, l'épuisait, la poitrine écrasée des continuelles charges, les bras cassés d'avoir à étreindre de telles masses et de tirer sur les liens de paille. Elle avait apporté le matin une bouteille, qu'elle allait remplir, d'heure en heure, à une mare voisine, croupie et empestée, buvant goulûment, malgré la diarrhée qui l'achevait depuis les chaleurs, dans le délabrement de son continuel excès de travail.

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