La Terre

La Terre (paragraphe n°1998)

Partie : TROISIEME PARTIE, chapitre VI

Dès que Lise eut tout fait disparaître dans son armoire, avec l'aide de Françoise, on trinqua enfin, on but à la santé de l'enfant baptisée, que la marraine avait nommée Laure, de son prénom. Puis, l'on s'oublia un instant, à causer ; et l'on entendit monsieur Charles, assis sur la malle, interroger madame Charles, sans attendre d'être seul avec elle, dans l'impatience où il était de savoir comment les choses marchaient, là-bas. Il se passionnait encore, il rêvait toujours de cette maison, si énergiquement fondée autrefois, tant regrettée depuis. Les nouvelles n'étaient pas bonnes. Certes, leur fille Estelle avait de la poigne et de la tête ; mais, décidément, leur gendre Vaucogne, ce mollasson d'Achille, ne la secondait pas. Il passait les journées à fumer des pipes, il laissait tout salir, tout casser : ainsi les rideaux des chambres avaient des taches, la glace du petit salon rouge était fêlée, partout les pots à eau et les cuvettes s'ébréchaient, sans qu'il intervînt seulement ; et le bras d'un homme était si nécessaire, pour faire respecter le mobilier de la maison ! A chaque nouveau dégât qu'il apprenait ainsi, monsieur Charles poussait un soupir, ses bras tombaient, sa pâleur augmentait. Une dernière plainte, murmurée à voix plus basse, l'acheva.

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