La Terre

La Terre (paragraphe n°2684)

Chapitre VI

Elle, simplement, désirait en finir. Plutôt que de se remettre avec Lise, elle se serait fait tuer, raidie dans une de ces idées de justice, qui, enfant, la ravageaient déjà. Sacause était la seule juste, elle se méprisait d'avoir patienté si longtemps ; et elle restait muette sur Buteau, elle ne parlait durement que de sa sœur, sans laquelle on aurait pu continuer à loger ensemble. Aujourd'hui que c'était cassé, bien cassé, elle vivait dans l'unique pensée de se faire rendre son bien, sa part d'héritage. Ça la tracassait du matin au soir, elle s'emportait parce qu'il fallait des formalités, à n'en point sortir. Comment ? ceci est à moi, ceci est à toi, et l'on n'en finissait pas en trois minutes ! C'était donc qu'on s'entendait pour la voler ? Elle soupçonnait toute la famille, elle en arrivait à se dire que, seul, un homme, un mari, la tirerait de là. Sans doute, Jean n'avait pas grand comme la main de terre, et il était son aîné de quinze ans. Mais aucun autre garçon ne la demandait, pas un peut-être ne se serait risqué, à cause des histoires chez Buteau, que personne ne voulait avoir contre soi, tant on le craignait à Rognes. Puis, quoi ? elle était allée une fois avec Jean ; ça ne faisait trop rien, puisqu'il n'y avait pas eu de suite ; seulement, il était bien doux, bien honnête. Autant celui-là, du moment qu'elle n'en aimait pas d'autre et qu'elle en prenait un, n'importe lequel, pour qu'il la défendit et pour que Buteau enrageât. Elle aussi aurait un homme à elle.

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