La Terre

La Terre (paragraphe n°2711)

Chapitre VI

On avait décidé que Françoise continuerait à loger chez la Grande, tant que le partage ne serait pas fait, car elle avait arrêté, dans sa volonté de fille têtue, qu'elle aurait la maison. A quoi bon louer ailleurs, pour quinze jours ? Jean, qui devait rester charretier à la ferme, en attendant, viendrait simplement la retrouver, chaque soir. Leur nuit de noce fut toute bête et triste, bien qu'ils ne fussent pas fâchés d'être enfin ensemble. Comme il laprenait, elle se mit à pleurer si fort, qu'elle en suffoquait ; et pourtant il ne lui avait pas fait de mal, il y était allé au contraire très gentiment. Le pire était qu'au milieu de ses sanglots, elle lui répondait qu'elle n'avait rien contre lui, qu'elle pleurait sans pouvoir s'arrêter, en ne sachant même pas pourquoi. Naturellement, une pareille histoire n'était guère de nature à échauffer un homme. Il eut beau ensuite la reprendre, la garder dans ses bras, ils n'y éprouvèrent point de plaisir, moins encore que dans la meule, la première fois. Ces choses-là, comme il l'expliqua, quand ça ne se faisait pas tout de suite, ça perdait de son goût. D'ailleurs, malgré ce malaise, cette sorte de gêne qui leur avait barbouillé le cœur à l'un et à l'autre, ils étaient très d'accord, ils achevèrent la nuit, ne pouvant dormir, à décider de quelle façon marcheraient les choses, lorsqu'ils auraient la maison et la terre.

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