La Terre

La Terre (paragraphe n°638)

Chapitre I

Un matin, son patron vint l'installer à la Borderie, pour des réparations. Il y avait un bon mois de travail, des chambres à parqueter, des portes, des fenêtres à consolider un peu partout. Lui, heureux, traîna la besogne six semaines. Sur ces entrefaites, son patron mourut, et le fils, qui s'était marié, alla s'établir dans le pays de sa femme. Demeuré à la Borderie, où l'on découvrait toujours des bois pourris à remplacer, le menuisier y fit des journées pour son compte ; puis, comme la moisson commençait, il donna un coup de main, resta six semaines encore ; de sorte que, le voyant si bien mordre à la culture, le fermier finit par le garder tout à fait. En moins d'un an, l'ancien ouvrier devint un bon valet de ferme, charriant, labourant, semant, fauchant, dans cette paix de la terre, où il espérait contenter enfin son besoin de calme. C'était donc fini de scier et de raboter ! Et il paraissait né pour les champs, avec sa lenteur sage, son amour du travail réglé, ce tempérament de bœuf de labour qu'il tenait de sa mère. Il fut ravi d'abord, il goûta la campagne que les paysans ne voient pas, il la goûta à travers des restes de lectures sentimentales, des idées de simplicité, de vertu, de bonheur parfait, telles qu'on les trouve dans les petits contes moraux pour les enfants.

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