Le Docteur Pascal

Le Docteur Pascal (paragraphe n°1035)

Chapitre VIII

Cependant, Pascal et Clotilde élargissaient encore leur domaine, allongeaient chaque jour leurs promenades, les poussaient à présent en dehors de la ville, dans la campagne vaste. Et, une après-midi qu'ils se rendaient àla Séguiranne, ils éprouvèrent une émotion, en longeant les terres défrichées et mornes, où s'étendaient autrefois les jardins enchantés du Paradou. La vision d'Albine s'était dressée, Pascal l'avait revue fleurir comme un printemps. Jamais, autrefois, lui qui se croyait déjà très vieux et qui entrait là pour sourire à cette petite fille, il n'aurait cru qu'elle serait morte depuis des années, lorsque la vie lui ferait le cadeau d'un printemps pareil, embaumant son déclin. Clotilde, ayant senti la vision passer entre eux, haussait vers lui son visage, en un besoin renaissant de tendresse. Elle était Albine, l'éternelle amoureuse. Il la baisa sur les lèvres ; et, sans qu'ils eussent échangé une parole, un grand frisson traversa les terres plates, ensemencées de blé et d'avoine, où le Paradou avait roulé sa houle de prodigieuses verdures.

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