Le Docteur Pascal

Le Docteur Pascal (paragraphe n°1172)

Chapitre IX

Pascal, et Félicité, et Clotilde, avaient compris. Ils se regardèrent involontairement, ils frémirent. C'était toute l'histoire violente de la vieille mère, de leur mère à tous, qui s'évoquait, la passion exaspérée de sa jeunesse, la longue souffrance de son âge mûr. Déjà deux chocs moraux l'avaient terriblement ébranlée : le premier, en pleine vie ardente, lorsqu'un gendarme avait abattu d'un coup de feu, comme un chien, son amant, le contrebandier Macquart ; le second, à bien des années de distance, lorsqu'un gendarme encore, d'un coup de pistolet, avait cassé la tête de son petit-fils Silvère,l'insurgé, la victime des haines et des luttes sanglantes de la famille. Du sang, toujours, l'avait éclaboussée. Et un troisième choc moral l'achevait, du sang l'éclaboussait, ce sang appauvri de sa race qu'elle venait de voir couler si longuement, et qui était par terre, tandis que le royal enfant blanc, les veines et le cœur vides, dormait.

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