Le Docteur Pascal

Le Docteur Pascal (paragraphe n°1879)

Chapitre XIV

Puis, dans la songerie de Clotilde, la figure de sa grand-mère Félicité s'évoquait. Celle-ci venait la visiterde temps à autre, avec une condescendance de parente puissante, qui est d'esprit assez large pour pardonner toutes les fautes, quand elles sont cruellement expiées. Elle arrivait à l'improviste, embrassait l'enfant, faisait de la morale, donnait des conseils ; et la jeune mère avait pris, vis-à-vis d'elle, l'attitude simplement déférente que Pascal avait gardée toujours. D'ailleurs, Félicité était toute à son triomphe. Elle allait réaliser enfin une idée longtemps caressée, mûrement réfléchie, qui devait consacrer par un monument impérissable la pure gloire de la famille. Cette idée était d'employer sa fortune, devenue considérable, à la construction et à la dotation d'un Asile pour les vieillards, qui s'appellerait l'Asile Rougon. Déjà, elle avait acheté le terrain, une partie de l'ancien Jeu de Mail, en dehors de la ville, près de la gare ; et précisément, ce dimanche-là, vers cinq heures, quand la chaleur tomberait un peu, on devait poser la première pierre, une solennité véritable, honorée par la présence des autorités, et dont elle serait la reine applaudie, au milieu d'un concours énorme de population.

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