Le Docteur Pascal

Le Docteur Pascal (paragraphe n°1880)

Chapitre XIV

Clotilde éprouvait, en outre, quelque reconnaissance pour sa grand-mère, qui venait de montrer un désintéressement parfait, lors de l'ouverture du testament de Pascal. Celui-ci avait institué la jeune femme sa légataire universelle ; et la mère, qui gardait son droit à la réserve d'un quart, après s'être déclarée respectueuse des volontés dernières de son fils, avait simplement renoncé à la succession. Elle voulait bien déshériter tous les siens, ne leur léguer que de la gloire, en employant sa grosse fortune à l'érection de cet Asile qui porterait le nom respecté et béni des Rougon aux âges futurs ; mais, aprèsavoir été, pendant un demi-siècle, si âpre à la conquête de l'argent, elle le dédaignait à cette heure, épurée dans une ambition plus haute. Et Clotilde, grâce à cette libéralité, n'avait plus d'inquiétude pour l'avenir : les quatre mille francs de rente leur suffiraient, à elle et à son enfant. Elle l'élèverait, elle en ferait un homme. Même elle avait placé, sur la tête du petit, à fonds perdus, les cinq mille francs du secrétaire ; et elle possédait encore la Souleiade, que tout le monde lui conseillait de vendre. Sans doute, l'entretien n'en était pas coûteux, mais quelle vie de solitude et de tristesse, dans cette grande maison déserte, beaucoup trop vaste, où elle était comme perdue ! Jusque-là, pourtant, elle n'avait pu se décider à la quitter. Peut-être ne s'y déciderait-elle jamais.

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