Le Docteur Pascal

Le Docteur Pascal (paragraphe n°938)

Chapitre VII

Et, maître, si je t'ai toujours aimé, du plus loin de ma jeunesse, c'est, je crois bien, la nuit terrible, que tu m'as marquée et faite tienne... Tu te rappelles de quelle étreinte violente tu m'avais étouffée. Il m'en restait unemeurtrissure, des gouttes de sang à l'épaule. J'étais à demi nue, ton corps était comme entré dans le mien. Nous nous sommes battus, tu as été le plus fort, j'en ai conservé le besoin d'un soutien. D'abord, je me suis crue humiliée ; puis, j'ai vu que ce n'était qu'une soumission infiniment douce... Toujours je te sentais en moi. Ton geste, à distance, me faisait tressaillir, car il me semblait qu'il m'avait effleurée. J'aurais voulu que ton étreinte me reprît, m'écrasât jusqu'à me fondre en toi, à jamais. Et j'étais avertie, je devinais, que ton désir était le même, que la violence qui m'avait faite tienne t'avait fait mien, que tu luttais pour ne pas me saisir, au passage, et me garder... Déjà, en te soignant, quand tu as été malade, je me suis contentée un peu. C'est à partir de ce moment que j'ai compris. Je ne suis plus allée à l'église, je commençais à être heureuse près de toi, tu devenais la certitude... Rappelle-toi, je t'avais crié, sur l'aire, qu'il manquait quelque chose, dans notre tendresse. Elle était vide, et j'avais le besoin de l'emplir. Que pouvait-il nous manquer, si ce n'était Dieu, la raison d'être du monde ? Et c'était la divinité en effet, l'entière possession, l'acte d'amour et de vie.

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