Le Rêve

Le Rêve (paragraphe n°1040)

Chapitre XIV

Alors, la solennité commença. Tout le clergé était présent, des prêtres étaient venus des paroisses, pour honorer leur évêque. Dans ce flot blanc des surplis, dont les grilles débordaient, luisaient les chapes d'or des chantres et les robes rouges des enfants de chœur. L'éternelle nuit des bas-côtés, sous l'écrasement des chapelles romanes, s'éclairait ce matin-là du limpide soleil d'avril, allumant les vitraux, où rougeoyait une braise de pierreries. Mais l'ombre de la nef, surtout, flambait d'un fourmillement de cierges, des cierges aussi nombreux que les étoiles en un ciel d'été : au milieu, le maître-autel en était incendié, l'ardent buisson symbolique brûlant du feu des âmes ; et il y en avait dansdes flambeaux, dans des torchères, dans des lustres ; et, devant les époux, deux grands candélabres, à branches rondes, faisaient comme deux soleils. Des massifs de plantes vertes changeaient le chœur en un jardin vivace, que fleurissaient de grosses touffes d'azalées blanches, de camélias blancs et de lilas blancs. Jusqu'au fond de l'abside, étincelaient des échappées d'or et d'argent, des pans entrevus de velours et de soie, un éblouissement lointain de tabernacle, parmi les verdures. Et, au-dessus de ce braisillement, la nef s'élançait, les quatre énormes piliers du transept montaient soutenir la voûte, dans le souffle tremblant de ces milliers de petites flammes, qui donnaient un frisson à la pleine lumière des hautes fenêtres gothiques.

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