Le Rêve

Le Rêve (paragraphe n°817)

Chapitre XI

Puis, chaque fois, jusqu'à présent, à la minute de son extrême détresse, une fraîcheur la soulageait. C'était lagrâce qui avait pitié, qui entrait en elle lui rendre son illusion. Elle sautait pieds nus sur le carreau de la chambre, elle courait à la fenêtre, dans un grand élan ; et là, elle entendait de nouveau les voix, des ailes invisibles effleuraient ses cheveux, le peuple de la Légende sortait des arbres et des pierres, l'entourait en foule. Sa pureté, sa bonté, tout ce qu'il y avait d'elle dans les choses, lui revenait et la sauvait. Dès lors, elle n'avait plus peur, elle se savait gardée : Agnès était de retour, en compagnie des vierges, errantes et douces dans l'air frissonnant. C'était un encouragement lointain, un long murmure de victoire qui lui parvenait, mêlé au vent de la nuit. Pendant une heure, elle respirait cette douceur calmante, mortellement triste, affermie en sa volonté d'en mourir, plutôt que de manquer à son serment. Enfin, brisée, elle se recouchait, elle se rendormait avec la crainte de la crise du lendemain, tourmentée toujours de cette idée qu'elle finirait par succomber, si elle s'affaiblissait ainsi, à chaque fois.

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