Le Ventre de Paris

Le Ventre de Paris (paragraphe n°610)

Chapitre III

Et elle montrait, sur des planches lessivées, d'une propreté excessive, de grands brochets étalés par rang de taille, à côté de tanches bronzées et de lots de goujons en petits tas. Maintenant, elle avait les mains toutes grasses de suint des carpes ; elle les écartait, debout dans l'humidité des viviers, au-dessus des poissons mouillés de l'étalage. On l'eût dite enveloppée d'une odeur de frai, d'une de ces odeurs épaisses qui montent des joncs et des nénuphars vaseux, quand les œufs font éclater les ventres des poissons, pâmés d'amour au soleil. Elle s'essuya les mains à son tablier, souriant toujours, de son air tranquille de grande fille au sang glacé, dans ce frisson des voluptés froides et affadies des rivières.

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