Nana

Nana (paragraphe n°1575)

Chapitre VIII

Mais, à ce moment, une femme qui entrait lui causa une surprise. Elle avait reconnu madame Robert. Celle-ci, avec sa jolie mine de souris brune, adressa un signe de tête familier à la grande bonne maigre, puis vint s'appuyer au comptoir de Laure. Et toutes deux se baisèrent, longuement. Nana trouva cette caresse-là très drôle de la part d'une femme si distinguée ; d'autant plus que madame Robert n'avait pas du tout son air modeste, au contraire. Elle jetait des coups d'œil dans le salon, causant à voix basse. Laure venait de se rasseoir, tassée de nouveau, avec la majesté d'une vieille idole du vice, à la face usée et vernie par les baisers des fidèles ; et, au-dessus des assiettes pleines, elle régnait sur sa clientèle bouffie de grosses femmes, monstrueuse auprès des plus fortes, trônant dans cette fortune de maîtresse d'hôtel qui récompensait quarante années d'exercice.

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