Nana

Nana (paragraphe n°2214)

Chapitre XI

Cependant, ils s'étaient lancés. Egayée, elle les regardait se couler entre les roues, se baisser sous les têtes des chevaux, battre la pelouse entière. Dès qu'ils reconnaissaient quelqu'un dans une voiture, ils accouraient, ils poussaient Nana. Et c'étaient de grands éclats de rire qui passaient sur la foule, lorsque parfois ils se retournaient, triomphants, indiquant des nombres avec le doigt, tandis que la jeune femme, debout, agitait son ombrelle. Pourtant, ils faisaient d'assez pauvre besogne. Quelques hommes se laissaient convaincre ; par exemple, Steiner, que la vue de Nana remuait, risqua trois louis. Mais les femmes refusaient, absolument. Merci, pourperdre à coup sûr ! Puis, ce n'était pas pressé de travailler au succès d'une sale fille qui les écrasait toutes, avec ses quatre chevaux blancs, ses postillons, son air d'avaler le monde. Gaga et Clarisse, très pincées, demandèrent à la Faloise s'il se fichait d'elles. Quand Georges, hardiment, se présenta devant le landau des Mignon, Rose, outrée, tourna la tête, sans répondre. Il fallait être une jolie ordure, pour laisser donner son nom à un cheval ! Au contraire, Mignon suivit le jeune homme, l'air amusé, disant que les femmes portaient toujours bonheur.

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