Nana

Nana (paragraphe n°2821)

Chapitre XIV

Elles étaient arrivées. Sur le boulevard, le cocher avait dû retenir ses chevaux, au milieu d'un embarras devoitures et de piétons. Dans la journée, le Corps législatif venait de voter la guerre ; une foule descendait de toutes les rues, coulait le long des trottoirs, envahissait la chaussée. Du côté de la Madeleine, le soleil s'était couché derrière un nuage sanglant, dont le reflet d'incendie faisait flamber les fenêtres hautes. Un crépuscule tombait, une heure lourde et mélancolique, avec l'enfoncement déjà obscur des avenues, que les feux des becs de gaz ne piquaient pas encore de leurs étincelles vives. Et, parmi ce peuple en marche, des voix lointaines grandissaient, des regards luisaient dans des faces pâles, tandis qu'un grand souffle d'angoisse et de stupeur épandu emportait toutes les têtes.

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