Nana

Nana (paragraphe n°2888)

Chapitre XIV

Deux femmes arrivèrent encore : Tatan Néné et Louise Violaine. Celles-là battaient le Grand Hôtel depuis vingt minutes, renvoyées de garçon en garçon ; elles avaient monté et descendu plus de trente étages, au milieu d'une débâcle de voyageurs qui se hâtaient dequitter Paris, dans la panique de la guerre et de cette émotion des boulevards. Aussi, en entrant, se laissèrent-elles tomber sur des chaises, trop lasses pour s'occuper de la morte. Justement, un vacarme venait de la chambre voisine ; on roulait des malles, on cognait les meubles, avec tout un bruit de voix broyant des syllabes barbares. C'était un jeune ménage autrichien. Gaga racontait que, pendant l'agonie, les voisins avaient joué à se poursuivre ; et, comme une simple porte condamnée séparait les deux chambres, on les entendait rire et s'embrasser, quand ils s'attrapaient.

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