Son Excellence Eugène Rougon

Son Excellence Eugène Rougon (paragraphe n°1469)

Chapitre VIII

Le cœur manqua à tous deux. Ils s'assirent, le mari sur la malle, la femme sur un paquet de linge, au milieu du bouleversement de la pièce. Et, avec des paroleslongues et molles, ils se plaignirent ; quand l'un se taisait, l'autre recommençait. Ils rappelaient leur tendresse pour le petit-cousin Chevassu. Comme ils l'avaient aimé ! La vérité était qu'ils ne le voyaient plus depuis dix-sept ans, lorsqu'ils avaient appris sa mort. Mais, en ce moment, ils s'attendrissaient de très bonne foi, ils croyaient l'avoir entouré de toutes sortes d'attentions pendant sa maladie. Puis, ils accusèrent les sœurs de la Sainte-Famille de manœuvres honteuses ; elles avaient capté la confiance de leur parent, écartant de lui ses amis, exerçant une pression de toutes les heures sur sa volonté affaiblie de malade. Madame Charbonnel, qui était pourtant dévote, alla jusqu'à conter une histoire abominable, par laquelle leur petit-cousin Chevassu serait mort de peur, après avoir écrit son testament sous la dictée d'un prêtre, qui lui avait montré le diable, au pied de son lit. Quant à l'évêque de Faverolles, monseigneur Rochart, il faisait là un vilain métier, en dépouillant de leur bien de braves gens, connus de tout Plassans pour l'honnêteté avec laquelle ils s'étaient amassé une petite aisance, dans les huiles.

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