Son Excellence Eugène Rougon

Son Excellence Eugène Rougon (paragraphe n°208)

Chapitre II

Rougon lut la lettre et l'alluma tranquillement à la bougie. C'était une lettre délicate. Et ils causèrent, par phrases coupées, s'interrompant à toutes les minutes, le nez dans des paperasses. Rougon remerciait Delestang d'être venu l'aider. Ce " bon ami " était le seul avec lequel il pût à l'aise laver le linge sale de ses cinq années de présidence. Il l'avait connu à l'Assemblée législative, où ils siégeaient tous les deux sur le même banc, côte à côte. C'était là qu'il avait éprouvé un véritable penchant pour ce bel homme, en le trouvant adorablement sot, creux et superbe. Il disait d'ordinaire, d'un air convaincu, que " ce diable de Delestang irait loin ". Et il le poussait, se l'attachait par la reconnaissance, l'utilisait comme un meuble dans lequel il enfermait tout ce qu'il ne pouvait garder sur lui.

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