Une page d'amour

Une page d'amour (paragraphe n°1231)

Partie : Partie 3, chapitre III

Ces semaines, ces mois qui coulaient, passèrent, monotones et charmants, sans qu'Hélène comptât les jours. Elle ne sortait plus, elle oubliait le monde entier, auprès de Jeanne. Pas une nouvelle du dehors n'arrivait jusqu'à elle. C'était, devant Paris emplissant l'horizon de sa fumée et de son bruit, une retraite plus reculée et plus close que les saints ermitages perdus dans les rocs. Son enfant était sauvée, cette certitude lui suffisait, elle employait les journées à guetter le retour de la santé, heureuse d'une nuance, d'un regard brillant, d'un geste gai. A chaque heure, elle retrouvait sa fille davantage, avec ses beaux yeux et ses cheveux qui redevenaient souples. Il lui semblait qu'elle lui donnait la vie une seconde fois. Plus la résurrection était lente, et plus elle en goûtait les délices, se souvenant des jours lointains oùelle la nourrissait, éprouvant, à la voir reprendre des forces, une émotion plus vive encore qu'autrefois, lorsqu'elle mesurait ses deux petits pieds dans ses mains jointes, pour savoir si elle marcherait bientôt.

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