Une page d'amour

Une page d'amour (paragraphe n°2346)

Partie : Partie 5, chapitre IV

Elle hocha la tête, elle retomba dans son immobilité. Pourtant, les employés des pompes funèbres attendaient sur le palier. Il fallait en finir. Monsieur Rambaud, qui lui-même chancelait comme un homme ivre, fit un signe suppliant à Juliette, pour qu'elle l'aidât à emmener la pauvre femme. Tous deux la prirent doucement sous les bras ; ils la levaient, ils la conduisaient vers la salle à manger. Mais quand elle comprit, elle les repoussa, dans une crise suprême de désespoir. Ce fut une scène navrante. Elle s'était jetée à genoux devant le lit, cramponnée aux draps, emplissant la chambre du tumulte de sa révolte ; tandis que Jeanne, étendue dans l'éternel silence, raidie et toute froide, gardait un visage de pierre. La face avait un peu noirci, la bouche prenait une moue d'enfant vindicative ; et c'était ce masque sombre et sans pardon de fille jalouse qui affolait Hélène. Elle l'avait bien vue, depuis trente-six heures, se glacer dans sa rancune, devenir plus farouche à mesure qu'elle se rapprochait de la terre. Quel soulagement, si Jeanne, une dernière fois, avait pu lui sourire !

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