Une page d'amour

Une page d'amour (paragraphe n°2400)

Partie : Partie 5, chapitre V

Les convois s'en étaient allés. Quelque part, dans une fosse voisine, on entendait les coups de pioche réguliers d'un fossoyeur qu'on ne voyait pas. Pourtant, la vieilleavait repris haleine, les yeux fixés sur la bourse. Alors, pour augmenter l'aumône, elle se montra très câline, elle parla de l'autre dame. On ne pouvait pas dire, c'était une dame charitable ; eh bien ! elle ne savait pas faire, son argent ne profitait pas. Prudemment, elle regardait Hélène en disant ces choses. Ensuite, elle se hasarda à nommer le docteur. Oh ! celui-là était bon comme le bon pain. L'été dernier, il avait encore fait un voyage avec sa femme. Leur petit poussait, un bel enfant. Mais les doigts d'Hélène, qui ouvraient la bourse, avaient tremblé, et la mère Fétu, tout d'un coup, changea de voix. Stupide, effarée, elle venait seulement de comprendre que la bonne dame se trouvait là près du tombeau de sa fille. Elle bégaya, soupira, tâcha de la faire pleurer. Une mignonne si gentille, avec des amours de petites mains, qu'elle voyait encore lui donner des pièces blanches. Et comme elle avait de longs cheveux, comme elle regardait les pauvres avec de grands yeux pleins de larmes ! Ah ! on ne remplaçait pas un ange pareil ; il n'y en avait plus, on pouvait chercher dans tout Passy. Aux beaux jours, elle apporterait chaque dimanche un bouquet de pâquerettes, cueilli dans le fossé des fortifications. Elle se tut, inquiète du geste dont Hélène lui coupa la parole. C'était donc qu'elle ne trouvait plus ce qu'il fallait dire ? La bonne dame ne pleurait pas, et elle ne lui donna qu'une pièce de vingt sous.

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