Une page d'amour

Une page d'amour (paragraphe n°328)

Partie : Partie 1, chapitre IV

La large baie du pavillon était ouverte, et de chaque côté on avait tiré dans leur châssis des glaces mobiles ; de sorte que le jardin se développait de plain-pied, comme au seuil d'une tente. C'était un jardin bourgeois, avec une pelouse centrale, flanquée de deux corbeilles. Une simple grille le fermait sur la rue Vineuse ; seulement, un tel rideau de verdure avait grandi là, que de la rue aucun regard ne pouvait pénétrer ; des lierres, des clématites, des chèvrefeuilles se collaient et s'enroulaient à la grille, et, derrière ce premier mur de feuillage, s'en haussait un second, fait de lilas et de faux ébéniers. Même l'hiver, les feuilles persistantes des lierres et l'entrelacement des branches suffisaient à barrer la vue. Mais le grand charme était, au fond, quelques arbres de haute futaie, des ormes superbes qui masquaient la muraille noire d'une maison à cinq étages. Ils mettaient, dans cet étranglement des constructions voisines, l'illusion d'un coin de parc et semblaient agrandir démesurément ce jardinet parisien, que l'on balayait comme un salon. Entre deux ormes pendait une balançoire, dont l'humidité avait verdi la planchette.

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