Germinal – 1580

Dehors, dans la ruelle, Etienne, embarrassé de la caisse, galopa, suivi des autres. L’idée brusque de Pierron lui vint, il demanda pourquoi on ne l’avait pas vu ; et Maheu, tout en courant, répondit qu’il était malade : une maladie complaisante, la peur de se compromettre. On voulait retenir Pluchart ; mais, sans s’arrêter, il déclara qu’il repartait à l’instant pour Joiselle, où Legoujeux attendait des ordres. Alors, on lui cria bon voyage, on ne ralentit pas la course, les talons en l’air, tous lancés au travers de Montsou. Des mots s’échangeaient, entrecoupés par le halètement des poitrines. Etienne et Maheu riaient de confiance, certains désormais du triomphe : lorsque l’Internationale aurait envoyé des secours, ce serait la Compagnie qui les supplierait de reprendre le travail. Et, dans cet élan d’espoir, dans ce galop de gros souliers sonnant sur le pavé des routes, il y avait autre chose encore, quelque chose d’assombri et de farouche, une violence dont le vent allait enfiévrer les corons, aux quatre coins du pays.