Germinal – 1747

Il leva un bras dans un geste lent, il commença ; mais sa voix ne grondait plus, il avait pris le ton froid d’un simple mandataire du peuple qui rend ses comptes. Enfin, il plaçait le discours que le commissaire de police lui avait coupé au Bon-Joyeux ; et il débutait par un historique rapide de la grève, en affectant l’éloquence scientifique : des faits, rien que des faits. D’abord, il dit sa répugnance contre la grève : les mineurs ne l’avaient pas voulue, c’était la Direction qui les avait provoqués, avec son nouveau tarif de boisage. Puis, il rappela la première démarche des délégués chez le directeur, la mauvaise foi de la Régie, et plus tard, lors de la seconde démarche, sa concession tardive, les dix centimes quelle rendait, après avoir tâché de les voler. Maintenant, on en était là, il établissait par des chiffres le vide de la caissede prévoyance, indiquait l’emploi des secours envoyés, excusait en quelques phrases l’Internationale, Pluchart et les autres, de ne pouvoir faire davantage pour eux, au milieu des soucis de leur conquête du monde. Donc, la situation s’aggravait de jour en jour, la Compagnie renvoyait les livrets et menaçait d’embaucher des ouvriers en Belgique ; en outre, elle intimidait les faibles, elle avait décidé un certain nombre de mineurs à redescendre. Il gardait sa voix monotone comme pour insister sur ces mauvaises nouvelles, il disait la faim victorieuse, l’espoir mort, la lutte arrivée aux fièvres dernières du courage. Et, brusquement, il conclut, sans hausser le ton.