La Débâcle – 1895

Dehors, Delaherche éprouva une difficulté plus grande à se frayer un passage parmi les groupes quiavaient grossi. Les rues, de minute en minute, s’emplissaient davantage, du flot des soldats débandés. Il questionna plusieurs des officiers qu’il rencontra : aucun n’avait aperçu le drapeau blanc sur la citadelle. Enfin, un colonel déclara l’avoir entrevu un instant, le temps de le hisser et de l’abattre. Cela aurait tout expliqué, soit que les Allemands n’eussent pu le voir, soit que, l’ayant vu apparaître et disparaître, ils eussent redoublé leur feu, en comprenant que l’agonie était proche. Même une histoire circulait déjà, la folle colère d’un général, qui s’était précipité, à l’apparition du drapeau blanc, l’avait arraché de ses mains, brisant la hampe, foulant le linge. Et les batteries prussiennes tiraient toujours, les projectiles pleuvaient sur les toits et dans les rues, des maisons brûlaient, une femme venait d’avoir la tête broyée, au coin de la place Turenne.